Anaphoraphobie

  • Le 01/06/2021

Du grec : anaphoros, répétition (« Moi, président… » vous souvenez ?) et phobos, peur. Donc la peur des répétitions quand on écrit ou quand on lit.

On se souvient tous des annotations rageuses de nos profs dans les marges de nos premières rédactions : Répétition ! Répétition !... Alors forcément, on en a gardé quelque chose.

Par exemple, à la lecture de ces quelques lignes de Michael Connely qui n’est certes pas en termes de style un exemple –euh, non… Là il faudrait plutôt dire… parangon ou …- quoi qu’il en soit, j’ai sursauté :

C’est alors que Luzon poussa Bosch dans les barreaux de la cellule. Puis il se rua dans la pièce et, à deux mains, fit coulisser la porte qui se ferma dans un bruit de métal. Il tira ensuite la chaîne et le cadenas entre les barreaux et verrouilla la porte. « Oscar, mais qu’est-ce que tu fais ? s’écria Lourdes. Tu n’as nulle part où aller ! » Bosch avait perdu l’équilibre en heurtant les barreaux. Il se redressa et chercha son porte-clés dans sa poche. La clé du cadenas y était accrochée. Mais le porte-clés n’était pas dans sa poche. Il regarda entre les barreaux

Beaucoup de barreaux, de portes, de clés… Trop ? Faut voir. Essayez d’écrire la même scène sans répétition et en gardant le rythme du récit. Pas facile…

Bien sûr, il y a moyen : les synonymes, les paraphrases, les circonlocutions... Il y a même une application qui trouve des répétitions là où vous n’en avez pas vu. Si, si, ça existe …

Moi ?

Je fais comme je le sens. Je me dis qu’une porte est une porte, un barreau, un barreau… et je relis « Exercices de style » de Raymond Queneau. 99 fois la même scène écrite de 99 façons différentes !  La diversité dans la répétition, ou le contraire…

Ah, j’allais oublier ! Le mot Anaphoraphobie n’existe pas, mais vous vous en doutiez, n’est-ce pas ?